Washington, DC, 1997.
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De la Danse.
IMPRIMERIE DE GOETSCHY,
Rue Louis le Brand.
PARIS,
CHEZ LES MARCHANDS DE NOUVEAUTÉS,
ET CHEZ TOUS LES LIBRAIRES DES TRÉATRES.
1830
EN écrivant quelques lignes sur la danse de ville, c'est-à-dire la danse bourgeoise Il ne sera nullement question ici de la danse théâtrale.
Je serais trop heureux si je pouvais, par mes observations, contribuer à faire disparaître le mauvais goût et les manières communes qui se sont tout à coup introduits dans la plus haute classe du monde.
Si l'on veut faire quelques pas rétrogrades, on verra bientôt la cause d'une pareille décadence. Tout le monde sait que naguère on dansait; maintenant on saute.
Il est vrai que depuis quelques années les bons maîtres à danser ont été confondus avec les médiocres, parce qu'on ne tient plus au choix pour ce qu'on en fait aujourd'hui; mais ceux qui ont prouvé, par les élèves qu'ils ont formés, que cet art est de la plus grande effi
Il existe bien certainement une grande différence entre la tenue que l'on a aujourd'hui et celle que l'on
La danse est une récréation que la nature nous a inspirée, et qui semble nous avoir été donnée pour exercer agréablement la vivacité de notre jeunesse. Nous en avons fait, par la suite, un art utile, en établissant des principes
Chez tous les peuples civilisés, la danse est aujonrd'hui un art qui préside aux agréments des soirées récréatives. Il n'est pas un être valide qui ne se sente animé du désir d'essayer ses forces en voyant les deux sexes se réunir noblement l'un et
Il est, sans doute, bien agrèable de pouvoir conduire ses enfants dans une société, sans craindre qu'ils s'y présentent maladroitement. Un salut ou une révérence faite décemment annonce de suite que l'on n'a pas négligé cette branche essentielle de leur éducation. Je la cite cómme
Mais aussi, quels reproches n'ont pas à
Beaucoup de jeunes personnes sans contredit se sont développées favorablement sans le secours de l'art, mais le nombre en est infiniment moins grand que l'autre; et c'est un bonheur sur lequel il ne faut
Le plus grand ridicule qu'on puisse avoir est, je crois, de se présenter dans une société pour n'y faire voir que de la pesanteur et un air embarrassé. C'est une gêne que les jeunes gens pourraient éviter, s'ils mettaient un peu plus d'importance à leur maintien. Il est vrai que mon langage
Cependant, je le dirai sans préambule, si l'on persiste à conserver ce soit disant bon ton, on verra, par la suite du temps, une grande partie de la jeunesse contrefaite et particulièrement les demoiselles qui passent ordinairement, leurs premières années renfermées dans des pensionnats; et qui sont continuellement attachées à des occupations paisibles qui souvent les empêchent de croître et leur retirent mème les forces. Il ne serait pas difficile de mettre sous les yeux les travaux qui les tiennent journellement dans une attitude courbée;
Un jeune homme, a beaucoup plus de moyens d'éconduire ces funestes accidents, parce qu'il peut aller plus librement seul. Il peut d'ailleurs se livrer à tous les exercices du corps, tels que l'équitation, l'escrime, la natation, la chasse; et quantité d'autres exercices qui stimulent ses forces et lui facilitent les moyens de croître favorablement. Cependant il peut encore, malgré tous ces avantages, s'établir en lui une marche opposée à un bon développement.
Quant aux demoiselles, je ne vois point où sont les moyens qu'elles peuvent prendre
C'est pourquoi, la danse, envisagée sous le rapport de l'éducation physique; n'est pas une chose si futile qu'on pourrait le croire. Beaucoup de personnes la considèrent, seulement, comme une chose d'agrément sans regarder plus loin; de sorte qu'à leurs yeux ce n'est qu'un enfantillage. Cependant je crois devoir leur faire
On peut aisément s'apercevoir que la critique qui se glisse journellement dans la société n'est, ordinairement, lancée que par des personnes plus ridicules par leurs mauvaises tenues que celles qui en font le sujet. Mais puisqu'on nous juge presque touj'òurs par nos dehors, il est évident que
Pourquoi se donne t-on la peine de travailler sur un instrument, ou bien d'exercer la voix pour la rendre plus claire? En un mot, pourquoi désire-t-on acquérir des talents? C'est bien certainement, pour se rendre présentable dans le monde.
On pourrait me dire que les personnes
J'ai remarquê que notre modestie, quelque grande qu'elle soit, laisse toujours une petite place à l'ambition; nous nous contentons rarement de notre seule approbation, nous désirons ordinairement obtenir celle des autres. C'est précisément ce sentiment bien louable, sans doute, qui nous donne l'assiduité du travail et
Si nous avions la certitude que nos talents seront toujours ignorés,nous n'aurions pas ce courage que nous donne l'espoir de les faire connaître immédiatement après les avoir acquis. Ainsi donc, puisque l'on prend tant de peine, soit pour tirer des sons mélodieux d'un instrument, soit pour faire entendre une belle voix, ou pour imiter et même embellir la nature, au moyen de couleurs et de pinceaux dirigés artistement; pourquoi nos jeunes et jolies personnes d'aujourd'hui semblent-elles ne vouloir s'occuper que de tout ce qui n'est pas elles? Est-ce qu'elles nous croient moins admirateurs de leurs personnes que de leur savoir? Pensent-elles que, lorsqu'elles
Supposons qu'une demoiselle possède au plus haut degré tous les talents dont j'ai parlé ci-dessus, par un sentiment auquel personne n'est indifférent, elle voudra les faire connaître. Le désir de rivaliser avec quelques personnes de son mérite la stimulera au point de chercher à faire encore mieux, s'il est possible; mais pour cela il faudra, indispensablement , qu'on la mène dans le monde; alors elle se trouvera
Ici, elle se pare de ses plus beaux atours. La tendre mère, au comble de la joie, vient prévenir sa fille bien-aimée, que la voiture
Ainsi donc le piano est ouvert; la harpe est accordée; les pupîtres sont disposés;
Une fantaisie, un caprice de nos plus célèbres compositeurs sont entendus dans le plus grand silence; le final du second
Je crois qu'après un pareil succès, une jeune personne doit être satisfaite d'ellemême. Les justes éloges qu'elle vient de recevoir, sont autant de félicités qui doivent l'encourager pour l'avenir et lui préparer encore de nouveaux suffrages. Il serait fâcheux qu'un sujet de tristesse vînt en ce
Nous avons quelquefois une volonté absolue qui nous porte à faire la dépense de tout notre courage pour obtenir une chose difficile,il est vrai, mais qui nous plaît et enchaîne tellement toutes nos idées, que nous avons de l'antipathie pour tout ce qui n'est pas l'objet qui nous a fixé. C'est par cela même qu'on néglige souvent d'apprendre diverses choses qui peuvent ajouter au bonheur de la vie. Les gens qui se sont livrés à l'enseignement, sont à même de voir cela journellement. Un professeur peut avoir pour écolière de musique une demoiselle remplie de moyens; mais si
Une leçon de danse, par exemple, exige plus d'attention que n'en demanderaient beaucoup d'autres d'un genre différent:
Les professeurs de danse n'ont point fait, jusqu'à ce jour, l'emploi de modèles qu'ils auraient pu faire lithographier ou graver (un petit nombre aurait suffi), pour faciliter aux élèves les moyens de s'exercer en l'absence du maître, en mettant sous leurs yeux un de ces modèles, au bas duquel on aurait expliqué les moyens nécessaires pour bien apprendre à faire un pas.
Il me semble que cette ressource était praticable aussi bien pour la danse que pour le dessin, la peinture, l'écriture et la musique. Peut-être y ont-il pensé, mais pas un ne l'a mise à exécution pour l'enseignement. Quelle que soit la cause de cette
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Les progrès dépendent plus souvent des élèves que du maître; il en est qui en font plus dans six mois que d'autres en un. Bien certainement cela existe dans les arts comme dans les sciences; il n'est pas donné
Il y a aujourd'hui beaucoup d'écoliers qui se refusent à faire tout ce qu'on veut leur enseigner, sous prétexte qu'on ne danse plus maintenant en société; quelle raison alors les force de faire venir un professeur, puisqu'ils ne veulent plus rien apprendre? Il me semble qu'ils pourraient lui éviter une démarche qui, par fois, devient pour lui une espèce de mystification; car du moment qu'un maiître est capable de bien remplir l'objet pour lequel il se présente, on doit, je pense, avoir pour lui quelque considération. Toutes les professions sont estimables quand elles sont utiles.
Je sais que celui qui enseigne la danse,
Il serait encore possible qu'un maître dont le talent est généralement reconnu se trouvât trop avancé en âge, et qu'alors l'exécution lui manquât: conclurait-on de cela qu'il n'est plus propre à démontrer, et que, du moment que celui qui enseigne à danser n'a plus de jeunesse, il faut qu'il renonce à son état? Cela n'est pas supposable.
Les élèves aiment bien, sans doute, que l'on fasse devant eux le pas qu'ils veulent apprendre; mais, pour le rendre parfaitement comme le maître doit le leur faire faire, il faudrait que lui-même s'exerçàt journellement, afin de ne jamais faire voir à ses écoliers que des pieds tournés en dehors, les pointes très basses, et qu'il joigniît à ces deux conditions essentielles une bonne tenue, de la grâce, et surtout une grande légèreté; chose que l'on ne peut conserver qu'en ne se fatigant pas à faire de grandes courses pour aller enseigner. Il est donc absolument nécessaire qu'il fasse l'emploi d'une théorie, telle qu'il puisse parfaitement tirer parti des moyens de son élève, et que celui-ci reçoive, également de son maître, toutes les inductions nécessaires à sa réussite.
Je ne vois pas alors la raison pour laquelle les maîtres à danser craindraient toujours de trop faire pour rendre leur profession plus précieuse, et pourquoi ils abandonneraient les ameliorations qu'ils peuvent ajouter à leur enseignement. Seraient-ils done moins courageux ou moins ingénieux que les autres artistes avec lesquels ils ont toujours été de pair? Verraient-ils avec indifférence l'art le plus utile à la santé décroître et tomber de jour en jour sans chercher à le relever, en ce moment, surtout que les arts vont toujours en avançant? Veulent-ils qu'on les accuse d'être les seuls qui se soient arrêtés dans l'élan de nos perfectionnements, au point où en est notre civilisation? Voudraient-ils faire dire encore d'eux ce qu'on disait autrefois des maîtres de On disait alors qu'ils n'avaient d'esprit que dans les jambes.
Mais dans cet échange d'argent qu'on fait contre un très petit nombre de leçons au bout desquelles on doit tout savoir,
La danse, loin de faire des progrès, n'est même pas restée stationnaire; elle est déchue à un tel point, que les jeunes gens d'aujourd'hui ne veulent pas croire qu'on ait si bien dansé autrefois; aussi disent-ils ouvertement qu'ils ne connaissent pas d'amusement plus sot que celui de la danse. Cela se conçoit aisément. Les deux sexes, rassemblés en grand nombre, éprouvent de l'ennui sans en examiner la cause, quoiqu'elle se présente ici dans toute son évidence. En général, ni les messieurs ni les demoiselles ne sont nullement préparés pour faire quelque chose de gracieux, ce qui les rendrait vraisemblablement plus intéressans les uns aux autres; ils ne savent
La danse est à présent ce qu'elle était dans son enfance; on ne fait rien de plus que ce qu'on faisait à l'époque où les hommes ne connaissaient pas encore toute leur intelligence; on peut nommer cet art tout simplement la danse de la nature. Les sauvages n'en font pas moins que nous: lorsqu'ils sont dans leurs momens de joie, ils sautent, en faisant quelques gambades (comme font ordinairement les fous) sans mesure, sans autre intention que celle de démontrer, par leurs contorsions, qu'ils sont contens.
Cette dégénération du goût, pour ce qui a rapport aux graces du corps, ne flatte
Voici
à peu près ce que j'ai pu retenir d'une conversation' qui eut lieu entre une dame et sa demoiselle en ma présence; je crois pouvoir la transmettre ici sans paraître indiscret, et je pense qu'on y reconnaîtra quelques naïves vérités.
Ma fille, je vous en prie, tenez-vous donc mieux; depuis quelque temps vous vous négligez beaucoup.
O maman! je vous assure que je me tiens encore trop bien.
Comment cela, ma fille?
Oui, maman; vous savez que mademoiselle de ★★★ est sortie de la pension il y a bientôt un an?
Oui, ma fille.
Vous savez, maman, qu'elle avait beaucoup de grâce et qu'elle dansait fort bien?
Oh! certainement.
Vous l'avez sans doute remarquée le jour où nous avons passé la soirée au bal chez madame de ★★★?
Ma fille, il y avait tant de monde, que je l'ai à peine aperçue.
Eh bien! maman, je vous assure qu'elle danse à présent fort mal.
Qui vous a dit cela?
On ne me l'a pas dit; je l'ai regardée attentivement, et j'ai bien vu qu'elle ne tenait plus ses pieds en dehors, et qu'elle ne faisait plus aucun de ces jolis pas que nous faisions ensemble à la pension; elle ne sait mème plus tenir sa robe.
Ma fille, mademoiselle de ★★★ a tort.
Mais, maman, je vous assure bien que non; car j'ai remarqué que toutes ces demoiselles faisaient la même chose.
Eh bien! ma chère enfant, je vous dirai
Non sans doute, maman; mais cela n'empêche pas que, lorsqu'elles m'ont vu danser, elles ne m'aient dit que je dansais trop bien, et que c'était ridicule.
Par exemple, voilà qui est nouveau!
Oui, maman.
Et qu'avez-vous répondu, ma fille?
Maman, je n'ai rien dit; mais je me garderai bien à l'avenir de danser comme on me l'a enseigné, parce que je ne veux être ridicule.
Eh bien! ma fille, si vous voulez prendre des manières semblables à celles que l'on a aujourd'hui, vous me ferez beaucoup de peine.
O maman! je serais bien désolée si je vous affligeais en la moindre chose; mais je voudrais bien aussi ne pas faire différemment que tout le monde.
Tenez, regardez-moi, ma fille: j'ai passé le double de votre âge, et je me tiens encore mieux que vous. Croyez-vous que j'aurais conservé cette tenue si je m'étais négligée comme vous prétendez le faire?
O maman! je le sais très bien; mais aussi vous avez pu conserver les principes de bonne tenue qu'on enseignait alors, tandis qu'à présent cela paraît ridicule.
Mais, ma fille, vos principes sont encore les mêmes que ceux qu'on m'a donnés dans ma jeunesse, et puis il me semble que ce temps n'est pas déjà tant éloigné.
Non, maman; mais ce n'est tonjours plus comme cela qu'on se tient aujourd'hui.
J'en suis bien fâchée pour vous, ma chère amie; car ce qui est bien doit toujours se conserver, et l'on ne devrait jamais adopter ce qui est mal.
Maman, vous savez bien que mademoisalle de ★★★ a été souvent en soirée depuis qu'elle' n'est plus au pensionnat? Ainsi je pense qu'elle a pu distinguer ce qui est bien d'avec ce qui est mal.
Comment cela, ma fille? Vous admettez que mademoiselle de ★★★ a plus d'expérience que moi?
O maman! je suis bien loin d'en avoir la pensée.
Mais cependant, ma fille, il me semble que vous ne vous en rapportez guère à mes avis, d'aprés ce que vous venez de dire à l'instant. Au reste, mademoiselle, dansez bien ou dansez mal, ce n'est pas la chose à laquelle je tiens le plus; c'est particulièrement votre tenue qui m'intéresse.
Et voilà, maman, ce qui m'embarrasse beaucoup, car notre maître nous a toujours dit qu'il n'était pas nécessaire de se bien tenir pour mal danser.
Votre maître, ma fille, avait parfaitement raison; aussi je ne conçois pas qu'on ait adopté une manière de danser aussi niaise que celle que l'on a maintenant. Il n'y a pas de doute que cela ferait un vilain contraste si l'on voyait une jeune personne bien tenue, bien préparée, se mettre à marcher continuellement avec indolence, comme vous faites toutes; car, lorsque vous êtes à la danse, vous prenez un air tellement nonchalant, qu'on s'imaginerait
Oh! cela est bien vrai. Maman, avez voùs vu le fils de monsieur le marquis de ★★★? Mon Dieu! comme il a mauvaise tournure! on croirait qu'il ne peut pas lever la tête; et, puis, je crois qu'il a une épaule plus haute que l'autre.
Ma fille, je l'ai très bien remarqué aussi. Tu sais, ma bonne amie, qu'il y a une figure de contre-danse que l'on nomme
la pastourelle
?
Oui, maman.
Tu dois savoir alors qu'il y a un
solo
de huit mesures qui doivent être dansées par le cavalier seul?
Oh! oui, maman. Quand j'étais à la pension, on nous faisait danser des quadrilles, et je tenais souvent la place du cavalier, parce que cela m'amusait beaucoup de danser les solos.
Eh bien! mon enfant, quand le sien a commencé, il a d'abord ôté ses gants, puis ensuite il les a remis; et c'est avec cela qu'il a rempli ces huit mesures.
O maman! comme c'est gauche pour un jeune homme comme lui!…
Ma fille, je suis bien persuadée qu'il ne pense pas cela, et qu'il se croit, au contraire, charmant.
Eh bien! maman, je lui en ferai mou compliment la première fois que je le verrai.
Non, ma chère amie; vous êtes trop jeune encore pour vous permettre de faire des observations, surtout à un jeune homme, cela ne conviendrait pas à une demoiselle bien élevée.
Maman, je vous assure bien que je ne suis pas trop jeune pour me bien moquer de lui.
Oh! pour cela, je n'en doute pas; mais il ne sait peut-être pas qu'il a si mauvaise tournure, et cela pourrait le fâcher. Il faut toujours ménager l'amour-propre de s autres.
Vous avez bien raison, maman; je n'y songeais pas du tout, et je lui aurais sans doute fait de la peine sans m'en douter.
C'est pour cela, ma chère enfant, que
Mais, maman, il ne fait pas un seul pas quand il danse; ainsi, je ne vois rien de plus insignifiant.
Que veux-tu, ma chére enfant, c'est la mode; tu as dû voir que tous ces messieurs n'en font pas plus que lui. Encore s'ils n'étaient pas toujours à jouer aux cartes, cela serait moins monotone.
Mais, mamann je croyais qu'il n'était permis qu'aux bons papas de jouer quand on est à la danse?
Ma bonne amie, c'cétait comme cela il n'y a pas encore bien long-temps; ces messieurs alors étaient sages, ils ne se laissaient pas entraîner par l'appàt du gain. On ne voyait pas la table de jeu couverte d'or comme elle l'est aujourd'hui; mais de puis que les jeunes gens ont pris la place des vieux, c'est bien différent; rien ne les arrête.
Ma foi, maman, je vous dirai que je ne comprends rien à tout ce qui se pratique
Le vrai mouvement de la contre-dense doit être fixé par le No 116 du métronome.
Vous avez raison, ma fille, c'est encore ce qui perd la danse; et à moins que cela ne change, je ne vois plus quel agrément vous pourrez avoir en société.
Eh! bien, maman, je ne fais que d'entrer
Mais, mon enfant, n'allez pas croire que ce soit toujours comme cela, et d'ailleurs il n'y a guère que la danse qui soit négligée à ce point; mais cela ne durera pas toujours. En général tout ce qui est de mauvais goût n'est pas de longue durée. Ainsi, ma bonne amie, que rien ne t'inquiète à cet égard; persuade-toi bien que nous rappellerons bientôt nos manières gracieuses, et qu'alors nous ne les abandonnerons plus. Mais pour le moment, mon enfant, il ne faut pas songer à bien danser; la foule est trop grande dans les soirées d'aujourd'hui. On se presse, on s'entrepousse, au point
Il serait à désirer, maman, que le changement dont vous parlez fût prochain; car si les jeunes gens conservent encore longtemps la mauvaise tenue qu'ils ont maintenant, ils en auront une telle habitude qu'ils ne pourront plus s'en défaire.
Ma bonne amie, ta réflexion est fort juste, mais à qui serait la faute? Il est constant qu'une mauvaise tenue amène avec elle une vieillesse prématurée; mais comme chacun tient à sa conservation et qu'une
Maman, je sens tout le prix de I'intérêt que vous me portez. Votre tendresse pour moi m'est un sûr garant que vous ne voudrez jamais que ce qui peut m'être favorable. Je vous assure maintenant que je préfèrerais plutôt ne jamais aller en soirée que de m'y montrer pour danser aussi mai que le font la plupart de s de moiselles, et puis vous me faites trop bien voir le danger auquel on est exposé en se livrant à une mauvaise tenue. “J'aurais
Ma chère enfant, je suis enchantée de votre résolution; je n'en attendais pas moins de votre raison. Votre excellent cœur et les bons principes de morale que vous avez reçus ne me laisseront jamais de doutes sur votre soumission.
Il
est cependant à remarquer que la danse française n'est pas totalement
Les anciens Grecs et les Romains avaient tellement senti la nécessité de cert art pour former des jeunes gens bien developpés, qu'ils avaient établi des académies, dont le gouvernement faisait les frais. Par ce moyen, les enfants des deuz sexes étaient généralement bien conformés, et les hommes se trouvaient toujours disposés à supporter les fatigues de leurs travaux militaires, de même qu'ils trouvaient danss cette récrétion tout-à-fait innocente un
Les anciens se faisaient une gloire d'être robustes: leurs plaisirs étaient des exercices violents. Ils ne passaient point leurs jours à se faire traîner dans des chars, à couvert des influences de l'air, pour aller porter languissamment d'une maison dans une autre leur ennui et leur inutilité.
Ce moyen ne pourrait plus servir aujourd'hui, parce que l'amour-propre n'est plus de la partie. D'ailleurs ce sentiment qui nous porte toujours à bien faire, venant à s'en mêler, rencontrerait beaucoup d'obstacles, attendu qu'il faut être préparé pour bien exécuter la danse. Nos articulations ne peuvent pas obéir tout-à-coup à
(Extrait des OEuvres de Voltaire.)
notre volonté; il faut de l'habitude et celle-ci ne s'obtient qu'avec de la pratique et le temps.
Dans la danse, ce ne sont pas les pas qui sont jolis, ce n'est que la manière de les faire qui les rend agréables. Le soin que l'on met dans leur préparation, et le goût qu'on y apporte, en font le seul charme.
Il a toujours été convenu que pour bien danser il fallait avoir les pieds tournés en dehors, les pointes très-basses et le corps droit. Ce sont les trois principales choses que l'on doit obtenir de soi-même avant de chercher à s'enlever de terre. Il y a différents exercices qui aident à y parvenir et que l'on peut pratiquer seul quand on a pris quelques leçons. Il faut indispensablement
Toutes les personnes qui ont de bonnes jambes peuvent sauter, mais toutes ne peuvent pas danser, chose qui est bien différente.
La danse a sa portion de calcul comme tout ce qui dépend de nos facultés intellectuelles. Je ne doute nullementque celui qui a l'adresse de bien tacter ses pas et de les varier avec précision sur la mesure qui lui est donnée par le musicien, ne soit supérieur dans tout ce qu'il voudra apprendre à celui qui ne montrerait pas les mêmes facilités.
Il y a dans la danse des temps et des
Sans adresse, on ne peut pas bien danser.
C'est spécialement sous un point de vue philantropique, que nous devrions faire usage du mécanisme de la danse, aujourd'hui. Nos goûts, nos moœurs sont tellement changés, que nous ne trouvons plus de plaisir à nous livrer à cette salutaire récréation. Les seuls délassements d'esprit que l'on prend à présent, sont les spectacles et le jeu; on ne serait même pas de
Occupons-nous maintenant de notre charmante virtuose, et voyons si elle ajoutera encore aux heureuses idées qu'elle a laissées sur son compte.
Le salon n'est plus disposé comme il l'était. Aussitôt la musique terminée, tout se prépare pour la danse; les jeunes messieurs s'empressent d'inviter leurs dames.
Si l'on tournait les bras et les jambes d'un enfant qui vient au monde dans un sens opposé à celui, de la nature, et qu'on l'enmaillotât de la sorte pendant un an ou quinze mois, au bout de ce laps de temps on verrait ses petits membres grandir et grossir dans le sens auquel on les aurait contraints depuis le jour de sa naissance; et si I'on voulait alors les remettre dans leur position naturelle, il faudrait imaginer des
mecaniques
, à l'effet de remettre ce malheureux enfant à la torture, et encore il serait très douteux que l'on parvînt à les ramener dans leur état primitif.
Il y a, en France et chez les étrangers, des villes tellement pauvres et dénuées de toutes espèces de ressources, qu'il n'est pas possible à aucun professeur de s'y éta
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Il est toujours dangereux de laisser prendre aux enfans l'habitude de se mal tenir; rien n'est plus propre à détruire leur santé et â détériorer toute leur économie animale. C'est surtout à partir de quatorze à dix-huit ans que le danger devient éminent. A cet âge la nature fait un travail énorme sur eux; leur croissance paraît à vue d'oeil, et les épuise au point, qu'ils perdent toutes leurs forces. Ils font souvent des, maladies qui les mènent aux portes du tombeau. Ajoutez à cela, qu'ils commencent seulement à sentir le besoin d'apprendre, et qu'ils deviennent tout-à-coup studieux. Dès-lors, ils s'appliquent à l'étude, et perdent insensiblement la coutume de
C'est à cet âge critique qu'ils ont besoin plus que l'on ne pense du secours de l'art pour les aider à surmonter cette faiblesse qui appauvrit leur tempérament. La gymnastique, dans cette occasion, pourrait être employée avec succès; en la pratiquant journellement, le corps conserverait ses forces, et ne succomberait pas à l'épuisement de la croissance. A la suite de ce travail
Il y a des personnes très agées qui conservent toujours une démarche noble et le corps droit: on suppose alors que c'est un privilége que la nature leur a donné; mais je pense que c'est une erreur; il est plus probable que c'est une suite des soins qu'elles ont mis à surveiller leur tenue dans leur jeunesse. Cette bonne habitude, essence principale d,une bonne santé, assure presque toujours une croissance heureuse et un tempérament robuste.
Lorsque l'on tient la tête haute, et que
La faculté de médecine, quoique beaucoup plus savante aujourd'hui qu'elle ne l'a jamais été, s'occupe constamment de faire des recherches pour améliorer les moyens de guérir les maladies sans nombre
Qu'une jeune personne ait une petite plaie ou une légère contusion, on fera
Il n'y a pas de substances médicales et même nutritives qui puissent remplacer le manque d'exercice, et si l'on n'emploie pas cette ressource essentiellement bonne pour la jeunesse, on se prépare inévitablement de cruels regrets.
J'ai long-temps cherché à connaître les J'exerce la profession de maître à danser.
Je n'ai jamais considéré l'agrément qu'on obtient de la danse comme une chose qu'on ne puisse remplacer, et je dirai même que si elle n'était pas indispensablement nécessaire à la santé des jeunes gens,on pourrait s'en passer toutefois en l'échangeant contre un autre genre de divertissement également actif. Mais comme il est reconnu qu'une bonne Conformation est un bien inappréciable, et que les enfans, qui sont menacés de le perdre, par suite d'une excessive croissance ou par trop d'inaction, peuvent le conserver par
On dit que les professeurs de danse saient trop bien danser il y a quinze ans; je ne dirai pas non, quoique je ne comprenne pas tout-à-fait ce qu'on veut dire par le mot
trop bien:
j'ai toujours cru qu'on ne pouvait pas faire bien et mal tout à la fois; car ces deux estrêmes diffèrent tellement, que l'un doit nécessairement empêcher
Mais en 'admettant même que l'on ait franchi la limite voulue pour que les bonnes manières seules fussent admises dans la danse, il me semble qu'il était facile de ne pas la dépasser, en invitant messieurs les maîtres à se renfermer dans un choix de pas plus convenables dans un salon. Mais dans tous les cas, il n'y a pas de comparaison à faire aujourd'hui avec la danse de cette époque, car elle était alors très-intéressaute. Toutes les personnes qui faisalent partie d'un quadrille y mettaient l'amourpropre
A présent, je le demande, que voit-on, qu'aperçoit-on de bien? On ne fait plus rien pour se distinguer; on serait même honteux de faire quelque chose qui montrât de l'intelligence. Il semble, parce qu'on a, soi-disant, trop bien dansé jadis, que les jeunes gens d'aujourd'hui doivent danser en dépit du bon sens; il arrive même trèssouvent qu'ils terminent Un quadrille sans qu'on ait pu distinguer une seule figure. S'ils font cela pour établir une compensation, ils peuvent croire que leur but est rempli; car je ne vois pas comment on pourrait s'y prendre pour parvenir à danser plus mal, surtout. depuis dix ans; et dans la supposition que je viens de faire,
J'ai un peu voyagé en France et à l'étranger; j'ai vu des pays charmants, où le site admirable semble dire aux êtres qui le parcourent: “Ne vous avisez pas de vouloir [???]me changer de forme ni d'aspect; la [???]nature m'a fait naître ainsi, pour vous [???]apprendre à l'admirer et à respecter ses [???]productions.” J'ai vu d'autres sites arides et tout-à-fait nus qui, au contraire, semblaient dire aux hommes: “Mortels [???]heureux! la nature en vous créant vous [???]a donné l'esprit et l'intelligence pour que [???]vous puissiez tirer parti de tout ce
Ces idées me portent à croire que nous pouvons également perfectionner notre espèce, puisque nous sommes de même les produits de la nature, et que partout elle nous offre les moyens de nous servir de l'intelligence que nous tenons d'elle.
Certes, il ne dépend pas de nous de
Ce n'est pas lorsque l'enfant a déjà quelques années qu'il faut s'occuper de son petit individu; c'est du moment même qu'il vient au monde que nous lui devons les soins les plus précieux. D'abord, je poserai en fait que l'emmaillotement est contraire à l'accroissement de ses forces; ses petits membres n'ayant pas encore la
De tous les êtres qui ont vie sur la terre il n'y a que nous qui subissions une semblable oppression; nous ne recevons le jour que pour entrer dans une espèce de prison; mais que dis-je une prison! il n'en existe pas, je pense, qui ne laisse au malheureux qu'on y renferme la faculté de mouvoir librement. Enfin, pourquoi attache-t-on les bras et les jambes de l'enfant qui naît? Quelle nécessité y a-t-il de l'ensevelir au moment même où la nature le fait sortir du néant? Craint-on qu'il fasse du mal? Aurait
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Voudrait-on nous faire croire que la propreté exige de tels moyens? Pense-t-on qu'un innocent, qui n'est souvent propre qu'en apparence, et qu'on laisse journellemeut deux ou trois heures impregné dans l'humidité de ces matières, soit dans un état de salubrité? Une pareille idée serait stupide; aussi ne peut-elle exister que dans l'esprit d'une nourrice mercénaire qui cherchet
Je vais cependant terminer ce chapitre; car j'avouerai franchement que le sujet dont je m'entretiens maintenant est beaucoup au-dessus de mon jugement; aussi ne me serais-je pas permis d'en parler, si celui que je traite ne s'y rattachait d'une manière directe, Je ne doute pas que mes idées sur les changements favorables que l'on pourrait apporter aux usages consacrés pour les enfants nouveaux-nés ne soient par fois erronées;je ne veux pas non plus faire une loi d'une chose que je propose dans la
Voici ce que dit
Buffon
dans l'Histoire naturelle de l'homme:
“On ne peut pas éviter, en emmaillotant Vingt-cinq années employées à l'ensignement de la danse, et les remarques que j'ai été à même de faire pendant la croissance d'un grand nombre d'enfants qui se sont, pour ainsi dire, développés sous mes yeux, tant dans les pensionnats que dans les familles, m'ont suggéré l'idée d'établir un corset mécanique, au moyen duquel on peut se prémunir, d'une manière infaillible, contre les déviations de la taille; ce corset ne ressemble en rien à ceux qu'on a faits jusquâ ce jour pour les établissements örthopédiques, et les résultats fournissent jour nellement des preuves irrécusables de sa complète réussite.
Jusqu'ici, tout démontre que c'est à partir de la naissance de l'eufant, qu'on doit lui prodiguer des soins successifs, sans doute plus précieux qu'on ne croit pour le reste de sa vie.
Voici maintenant ce que dit M. le docteur Remy dans une dissertation médicale sur l'exercice de la danse:
“Quand on ne considère dans la danse [???]que la puérilité et le ridicule des gam [???]bades de cet exercice, on cesse d'être [???]étonné que des personnes recommanda [???]bles se soient élevées contre son usage: [???]mais envisagée sous le rapport de son
Ce raisonnement établi par une personne qui a étudié l'anatomie, me paraît sans réplique et confirme mon opinion sur les bons effets de la danse. Dans cette conviction, je suis persuadé que l'on s'est souvent trompé en faisant appeler des médecins pour traiter des jeunes personnes qui n'avaient d'autres indispositions que le manque d'exercice: alors on épuisait tous les secours que l'on croyaitnécessaires dans ces circonstances, sans en obtenir (bien entendu) aucun résultat favorable. En prenant une route si opposée, on les affaiblissait
L'exercice de la danse.
Combien en est-il de ces jeunes plantes (car on peut les nommer ainsi)? puisque d'un mois à l'autre leur physionomie et leurs formes naturelles changent? combien en est-il qui n'ont ni forces, ni respiration, et qui sont courbaturés pour la moindre promenade qu'elles ont faite à pied? Il me semble que cette raison seule, quoiqu'elle ne soit pas la plus forte, prouverait encore que l'exercice pris à propos, est la moitié de la vie, surtout dans la jeunesse.
Je ne crois pas cependant que ce soit en conduisant les enfants dans les soirées dansantes, qui se succèdent dans l'hiver, que l'on remplirait le but que je propose ( Quand par la foule on est trop pressé, le corps s'affaisse, et la bonne tenue disparaît. Une soirée de danse n'est belle maintenant que lorsque la foule se prolonge jusqu'au bas de l'escalier, il est même beaucoup de personnes qui, après avoir fait de grandes toilettes, 'ne peuvent seulement pas pénétrer jusqu'aux appartements.A mon beau Chaâteau, etc
. Cette manière de se tenir mutuellement par les mains, leur est sans doute suggérée par l'idée de ne pas se laisser tomber; rien ne peut être mieux jusqu'ici pour de si petits individus; mais pour les grandes personnes, il me semble qu'elles peuvent faire plus que cela; aussi les inviterai-je à remarquer que la confusion qui règne à présent dans les salons, les empêche, nonseulement de danser, mais elle est cause
Toutes les personnes qui ont jadis bien dansé conviendront sans peine que la danse la moins bien exécutée alors, serait encore préférable à ce qu'on fait de mieux aujourd'hui. Persuadé conme je le suis que cet exercice peut se joindre avec avantage aux études sérieuses, je ne prolongerai pas plus loin mes réflexions sur cet art qu'on ne peut abandonner sans faire une perte réelle. J'invite donc les jeunes gens à vouloir bien croire que les grâces du corps peuvent,
Nota
. Monsieur Alerme vient d'inventer un corset mécanique propre à servir aux deux sexes, et dans lequel il n'est pas possible de se mal tenir: on peut le serrer au point qu'on désire sans gêner d'aucune manière les mouvements du corps: le même peut servir à plusieurs personnes d'une taille plus ou moins haute, par le moyen d'un procédé particulier: ce corset est établi pour le bien de l'humanité: redresser les torts de la nature et prévenir les accidents, tel a été le but de l'auteur.
Il a également fait établir un nouveau genre de tourne-pieds de son invention, dans lequel on a l'avantage de redresser les genoux qui ne se jettent que trop souvent en dedans, ce qui fait assurément
Ces deux objets ne se trouvent qu'à son domicile, rue Thérèse, No
II.
On peut lui écrire à l'Académie royale de Musique à Paris
.
Les personnes qui désireraient se mettre promptement au courant des quadrilles, trouveront à son domicile un salon spacieux consacré à ses leçons.
FIN.